La Fédération des maisons médicales (FMM) : le collectif pour la santé pour tous et toutes !

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Table des matières

Au terme de ce double numéro consacré aux maisons médicales, le temps est venu de s’interroger sur les défis contemporains auxquels est confronté le secteur. À cet égard, le Mémorandum pour les élections de 2024, publié par la Fédération des maisons médicales (FMM),. Les revendications sont nombreuses et concernent différents niveaux de pouvoir, du communal à l’européen, en passant par le fédéral, le communautaire et le régional.

Pour éclairer ces défis contemporains, le CARHOP a rencontré la secrétaire générale de la FMM, Fanny Dubois, qui nous a expliqué le fondement et la raison d’être des maisons médicales, leur rôle fondamental pour la démocratisation de l’accès aux soins de santé, mais aussi la nécessité de défendre des mécanismes de solidarité forts (la Sécurité sociale) pour lutter contre la menace des politiques néo-libérales. .

Portrait

Fanny Dubois en quelques mots

Sociologue et aide-soignante à l’hôpital Saint-Pierre, à Bruxelles, Fanny Dubois étudie les conditions de travail des aides-soignantes, en étant au cœur du métier. . En croisant les savoirs pratiques et théoriques, elle prend conscience de l’utilité de faire évoluer le système de santé et d’y contribuer. En 2012, elle complète cette approche de terrain en rejoignant Solidaris, la mutualité socialiste. Elle y appréhende les enjeux du système de santé belge et de la Sécurité sociale, qui contribuent à la redistribution et au large accès aux soins de santé. Elle se confronte aussi aux rapports de force entre les différentes professions de soin, leurs syndicats et les mutuelles, avec, pointe-t-elle, des oubliés : les patient.e.s. C’est donc porteuse d’un solide bagage pratique et théorique que Fanny Dubois rejoint en 2019 la FMM.

Les patient.e.s, des acteurs à part entière de la santé individuelle et collective

Pour les maisons médicales, les patient.e.s sont partie prenante des processus à mener et des décisions à prendre qui engagent leur santé, pour ce qui concerne à la fois les facettes curatives et préventives, individuelles et collectives. C’est pourquoi, depuis plus de quarante ans, les maisons médicales déploient des actions de santé communautaire.

Dès les années 1960, sur l’exemple des expériences menées en Amérique latine et dans les pays anglo-saxons, le Groupe d’étude pour une réforme de la médecine (GERM) milite pour que l’individu et la communauté soient partie prenante des décisions sur les questions de santé, sur base d’une information la plus complète possible. La santé est un enjeu de lutte sociale, dès lors qu’elle considère les conditions de travail, l’environnement, l’alimentation ou le niveau culturel des patient.e.s comme des déterminants de leur état de santé. La FMM stipule dans sa Charte de 2006 que les maisons médicales doivent «  ». L’impulsion vient aussi des organisations internationales. En 1986, l’Organisation mondiale de la santé définit la santé communautaire dans la Charte d’Ottawa ; .

Affiche du film Travail soigné de Dorothée Bouillon consacré à la maison médicale liégeoise “Les Houlpays”, en coproduction CVB-FMM, 2024 (©CVB-FMM).

Aujourd’hui encore, la santé communautaire est mobilisée comme outil collectif et global de la santé, tant du point de vue institutionnel que dans la pratique quotidienne des maisons médicales. Selon Fanny Dubois, «  ».

L’ancrage populaire : toujours un impératif ?

. Il en est ainsi de leur lieu d’implantation et de leurs publics cibles. Historiquement, nombre de maisons médicales s’ancrent dans des quartiers populaires, marqués par la précarité. Dans la perspective de couvrir un champ toujours plus large de patient.e.s, la FMM accorde, encore aujourd’hui, une grande importance à l’implantation territoriale : « ».

L’implantation territoriale sert aussi un dessein de santé publique : «  ».

Si la FMM reste très sensible aux publics précarisés, elle mise aussi sur la mixité sociale pour soutenir la solidarité. Aujourd’hui, l’intuition de Fanny Dubois est la suivante : « ». Car, face à la néo-libéralisation de la médecine, de plus en plus de citoyen.ne.s sont intéressé.e.s par le modèle des maisons médicales et veulent s’y inscrire : « ».

Le forfait, un enjeu de santé publique

Dans la perspective d’une médecine accessible à toutes et tous, le financement au forfait est un dispositif qui collectivise et externalise les frais médicaux. Instauré au milieu des années 1980, il fonctionne dans une triangulation : les mutualités où sont affiliés les patient.e.s en ordre de cotisation paient mensuellement un forfait à leur maison médicale, laquelle assure en exclusivité les soins de santé préventifs, curatifs et palliatifs. , «  ». Le financement au forfait encourage aussi la santé préventive et communautaire. Pour des patients précarisés, le coût du paiement à l’acte peut en effet faire obstacle à une prise en charge continue de problèmes complexes sur la longue durée. En recourant au financement forfaitaire, la médecine dépasse aussi l’approche exclusivement curative (on répond à un mal à un moment donné) pour intégrer l’action médicale préventive. . Dans l’action politique des maisons médicales, opposer le fonctionnement au forfait et la médecine financée à l’acte n’a toutefois pas beaucoup de sens.  et Fanny Dubois croit «  ».

Assemblée générale de l’intergroupe des maisons médicales bruxelloises, Bruxelles, 17 octobre 2024. (©FMM)

Car, l’enjeu pour la FMM, c’est de penser, construire et défendre un nouveau modèle de médecine : il existe des « ».

Que redouter du néolibéralisme et quels sont les champs des possibles ?

Comme l’ensemble du non-marchand, le secteur des maisons médicales est dans le collimateur des gouvernements néo-libéraux. En 2016, la ministre libérale de la Santé, Maggie De Block, amorce des économies linéaires dans le secteur et dresse un moratoire de deux ans sur la création de nouvelles maisons médicales recourant au forfait. Elle commande un audit auprès d’un bureau commercial international, connu pour ses visées de privatisation des soins de santé, visant à établir si les dépenses relatives au secteur sont bien justifiées, eu égard à l’organisation, au fonctionnement et à la structure des coûts des maisons médicales. En définitive, les conclusions de la société en question leur sont favorables, bien que l’Absym, principal syndicat des médecins, dénonce leur concurrence déloyale. .

, leur posture est parfois plus idéologique que budgétaire, comme l’explique Fanny Dubois : «  ».

Les dix recommandations de la FMM
pour les élections de 2024

  1. Soutenir une Sécurité sociale fédérale forte et un système de soins cohérent
  2. Agir sur les déterminants de la santé de manière transversale : la santé dans toutes les politiques
  3. Améliorer l’accessibilité financière aux soins de santé de première ligne
  4. Rétablir et renforcer la concertation et la participation citoyenne dans le système de santé
  5. Un système de soins de santé échelonné et organisé autour des besoins des patient·e·s
  6. Une première ligne (ré)organisée
  7. Revaloriser les métiers pour une première ligne plus attractive
  8. Soutenir la création et le développement des pratiques de groupe pluridisciplinaires de première ligne
  9. Développer une politique du médicament efficiente
  10. Pour une informatisation raisonnée au service de l’humain

Face aux charges des gouvernements de centre-droit,. Deux retiennent particulièrement notre attention. Pour Fanny Dubois, il faut absolument défendre le fondement de notre système social : la Sécurité sociale. La FMM soutient une Sécurité sociale fédérale forte, la plus étendue possible, capable de soutenir un système de santé cohérent liant les politiques de santé curative et préventive, une priorité également défendue par d’autres mouvements sociaux, tels que les organisations syndicales. Aujourd’hui, ce système est mis à mal par les politiques d’austérité, mais aussi par les réformes de l’état successives (régionalisation accentuée) et l’éclatement des niveaux de compétence en matière de santé publique. . Pour Fanny Dubois, « .  ». En sus de cet impératif, le maintien et le renforcement d’une concertation sociale entre tous les acteurs concernés sont indispensables, principalement les mutualités et les professionnels de soins. Pour le dire autrement et reprendre le langage de l’éducation permanente, lutter contre les politiques de marchandisation ou d’étatisation de la Sécurité sociale exige une convergence de luttes.

à la manifestation du secteur non-marchand, Bruxelles, 22 mai 2025. (©FMM)

Le second point qui retient notre attention est en fait commun à plusieurs recommandations de la FMM : dès lors qu’il s’agit d’œuvrer à des politiques globales de santé en faveur de tous les patient.e.s, il convient de dépasser la conflictualité entre les acteurs de santé. Fondamentalement, opposer médecine privée (vision libérale) et maisons médicales (vision sociale) fait l’impasse sur les souhaits des praticiens. Fanny Dubois l’explique : «  ».

La santé : un enjeu d’éducation permanente ?

L’éducation permanente est consubstantielle du travail mené en maisons médicales. Dans son plaidoyer, la FMM recommande de «  », ce à quoi participent l’implication des patient.e.s dans la réflexion et l’action globale sur la santé (santé communautaire), la prise en charge collective de questions de santé individuelle, l’organisation et le fonctionnement en autogestion, la volonté de transformer le système de santé libéral en dispositif collectif, etc. Bref, le secteur ne vise ni plus ni moins qu’à une transformation sociale profonde, en ce compris du système de santé.  : « ».

Welter F., « La Fédération des maisons médicales (FMM) : le collectif pour la santé pour tous et toutes !  », Dynamiques. Histoire sociale en revue, n° 26 : Les maisons médicales, le droit à la santé pour tous et toutes ! Panorama d'initiatives inspirantes, mai 2025, mis en ligne le 28 mai 2025, https://www.carhop.deligraph.info/revuecarhop/